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120 ans de voyage à bord du train de L'Océan

Côte Atlantique

Par Marie-Julie Gagnon

Temps de lecture: 12 minutes

De Montréal à Halifax, l’Océan transporte les passagers de la ville à la mer sur 1 346 kilomètres. Une journée et une nuit à se laisser porter tranquillement par le roulis du train à travers trois provinces : le Québec, le Nouveau-Brunswick et la Nouvelle-Écosse. Effectué pour la première fois en 1904, ce voyage sur rails rappelle de grands moments de l’Histoire. Pleins feux sur le doyen des trains de passagers en Amérique du Nord.

L’Océan évoque l’ouverture vers tous les possibles, entraînant les passagers vers ou depuis la gare la plus à l’est du pays. Avant l’inauguration du chemin de fer Intercolonial en 1876, c’était une tout autre histoire.

Il faut remonter au 19e siècle pour comprendre l’importance de ce nouveau lien ferroviaire. Parce qu’il est grand et profond, et qu’il ne gèle pas, le port d’Halifax joue un rôle de premier plan dans le développement de la capitale de la Nouvelle-Écosse. Toutefois, à une époque où le transport routier relève encore de la science-fiction, comment transporter les marchandises vers l’intérieur du continent?

Une condition pour se joindre à la Confédération

Comme la Colombie-Britannique l’exigera quelques années plus tard pour adhérer à la Confédération, les provinces des Maritimes posent comme condition d’être reliées au continent par les rails. Le chemin de fer Intercolonial devient ainsi le premier grand projet de transport initié par ce qui était alors le Dominion du Canada.

Depuis 1856, le chemin de fer du Grand Tronc reliait l’ouest et l’est du Canada, aujourd’hui l’Ontario et le Québec. En plus de permettre aux provinces des Maritimes d’accéder au marché intérieur, le nouveau tronçon ouvre les horizons vers des possibilités d’exportation outre-Atlantique. Son intégration aux Chemins de fer nationaux du Canada, achevés en 1919, en fait le deuxième réseau de chemin de fer transcontinental.

Parce que les chemins de fer avaient d’immenses concessions de terres, ils ont également influencé le lieu où les immigrants, qui arrivaient par bateaux dans les différents ports du pays, dont celui d’Halifax, se sont établis. Des villes et des villages naissaient alors le long des rails.

Pendant la Deuxième Guerre mondiale, les soldats se rendaient en train vers le Quai 21 – qui a donné son nom à un musée –avant d’embarquer sur un navire.

 

Tout le monde à bord!

L’Océan à la Gare Centrale
Five Roses
Montréal

C’est avec toutes ces images en tête que je monte à bord de l’Océan à la Gare Centrale de Montréal. Je peine à imaginer comment devait se sentir un jeune soldat s’apprêtant à quitter le pays. On raconte aussi qu’à l’inverse, les épouses et des enfants nés de ces unions faisaient le chemin inverse.

Mon voyage ne peut être plus différent. En 2025, prendre le train est généralement un choix. On opte pour ce moyen de transport en raison de son charme suranné, pour éviter de prendre l’avion ou pour prendre la mesure du territoire. Opter pour le train, c’est s’offrir une délicieuse parenthèse hors du temps entre les points A et B, mais aussi l’occasion de voir le paysage se transformer.

C’est ma deuxième expérience à bord de l’Océan. La première fois, c’était avec ma fille, alors âgée de cinq ans. Pas une seconde elle ne s’était ennuyée. En plus de découvrir les paysages, elle en avait profité pour convaincre sa mère de jouer à tous les jeux auxquels je refusais habituellement de jouer à la maison. Combien de parties de UNO avons-nous enchaînées pendant ces 22 heures de trajet?

Maya et MJ

Des inconnus qui ne le restent pas

Au-delà des images de cartes postales, ce que je préfère des longs voyages sur rails est le moment des repas, où les passagers des voitures-lits sont placés de manière aléatoire au restaurant. À bord du Canadien comme de l’Océan, le hasard facilite les rencontres. On se trouve à partager des petits bouts de voyage avec des gens d’un peu partout.

Le serveur m’indique une table pour quatre, où trois personnes sont déjà installées. Les autres convives : un couple de Campbellton et une dame d’Edmonton. Les Néo-Brunswickois viennent de passer une dizaine de jours à Montréal pour une opération qui les empêchent de prendre l’avion. L’Albertaine a effectué une partie du voyage à bord du Canadien et exploré Montréal avant de mettre le cap sur Halifax. Elle réalise ainsi son vieux rêve de traverser le pays – du moins, en grande partie! – par les rails.

Voiture-restaurant
Repas
Repas
À table

Au menu, en plus des entrées et desserts : bœuf braisé glacé aux champignons, saumon au beurre de dukka avec riz, raviolis à la courge musquée ou panir tikka masala (fromage à pâte molle non salé servi avec sauce et riz)… Les discussions vont bon train (sans jeu de mots!). La convivialité est aussi du voyage.

Ma cabine est toute petite, mais parfaite pour me permettre de me réfugier dans ma bulle entre deux moments de socialisation. Le préposé vient transformer mon fauteuil en lit. Je lui demande de ne pas reconvertir au petit matin, histoire de profiter pleinement de mon cocon pour faire la sieste et lire à l’horizontale.

Couloir qui mène aux cabines individuelles
Wagon lit
L’arrière-scène de Moncton

Les Maritimes, autrement

Selon la direction dans laquelle on voyage, le moment de l’année et l’heure à laquelle le jour fait place à la nuit, le décor n’est jamais tout à fait le même. Cette fois-ci, les décors du Bas-Saint-Laurent et de la vallée de la Matapédia tapisseront seulement mes rêves. Certains ont du mal à dormir à bord : moi, malgré les couinements de la bête de métal, le mouvement m’apaise.

Les signaux de cellulaire se font rares pendant l’essentiel du trajet, me forçant à contempler autre chose que mon ordinateur et mon cellulaire. La workaolique que je suis a toujours un peu de mal à décrocher, mais une fois déconnectée, je me surprends à ressentir une grande (la sainte?) paix. Le temps suspend sa course folle. Je me coule dans l’indolence du présent. C’est peut-être le temps de la sieste?

Quand je ne dors pas, je scrute les cours arrière des villes et villages traversés. Je lis. Je grignote (un peu trop). À Campbellton, je sors prendre un bain de soleil pendant une courte pause.

Arrêt à Campbellton
Lecture
Petit-Rocher

Près de Restigouche, au Nouveau-Brunswick, j’écarquille les yeux. La brochure distribuée aux passagers m’indique que nous en sommes au 19e arrêt du voyage. « Petit-Rocher, c’est la mer à votre portée. Ce sont des gens chaleureux qui aiment la vie et les visiteurs. Agréable en été et regorgeant d’activités en hiver, le village est un plaisir à visiter toute l’année grâce à l’accueil chaleureux de ses habitants et à ses multiples attractions touristiques. Chaque année, le 15 août, la fête nationale des Acadiens se célèbre ici en grande pompe. » Viennent ensuite Bathurst, Miramichi, Rogersville, Moncton…

Rails
Voiture de service
Fenêtre

Je suis presque déçue à l’annonce de notre destination finale. Je salue les passagers avec lesquels j’ai fraternisé. Halifax m’attend, avec toute son histoire (et ses histoires). Le début d’un autre voyage!

Gare d’Halifax
Quai de gare d’Halifax

De Montréal à Halifax, l’Océan transporte les passagers de la ville à la mer sur 1 346 kilomètres. Une journée et une nuit à se laisser porter tranquillement par le roulis du train à travers trois provinces : le Québec, le Nouveau-Brunswick et la Nouvelle-Écosse. Effectué pour la première fois en 1904, ce voyage sur rails rappelle de grands moments de l’Histoire. Pleins feux sur le doyen des trains de passagers en Amérique du Nord.

L’Océan évoque l’ouverture vers tous les possibles, entraînant les passagers vers ou depuis la gare la plus à l’est du pays. Avant l’inauguration du chemin de fer Intercolonial en 1876, c’était une tout autre histoire.

Il faut remonter au 19e siècle pour comprendre l’importance de ce nouveau lien ferroviaire. Parce qu’il est grand et profond, et qu’il ne gèle pas, le port d’Halifax joue un rôle de premier plan dans le développement de la capitale de la Nouvelle-Écosse. Toutefois, à une époque où le transport routier relève encore de la science-fiction, comment transporter les marchandises vers l’intérieur du continent?

Une condition pour se joindre à la Confédération

Comme la Colombie-Britannique l’exigera quelques années plus tard pour adhérer à la Confédération, les provinces des Maritimes posent comme condition d’être reliées au continent par les rails. Le chemin de fer Intercolonial devient ainsi le premier grand projet de transport initié par ce qui était alors le Dominion du Canada.

Depuis 1856, le chemin de fer du Grand Tronc reliait l’ouest et l’est du Canada, aujourd’hui l’Ontario et le Québec. En plus de permettre aux provinces des Maritimes d’accéder au marché intérieur, le nouveau tronçon ouvre les horizons vers des possibilités d’exportation outre-Atlantique. Son intégration aux Chemins de fer nationaux du Canada, achevés en 1919, en fait le deuxième réseau de chemin de fer transcontinental.

Parce que les chemins de fer avaient d’immenses concessions de terres, ils ont également influencé le lieu où les immigrants, qui arrivaient par bateaux dans les différents ports du pays, dont celui d’Halifax, se sont établis. Des villes et des villages naissaient alors le long des rails.

Pendant la Deuxième Guerre mondiale, les soldats se rendaient en train vers le Quai 21 – qui a donné son nom à un musée –avant d’embarquer sur un navire.

 

Tout le monde à bord!

L’Océan à la Gare Centrale
Five Roses
Montréal

C’est avec toutes ces images en tête que je monte à bord de l’Océan à la Gare Centrale de Montréal. Je peine à imaginer comment devait se sentir un jeune soldat s’apprêtant à quitter le pays. On raconte aussi qu’à l’inverse, les épouses et des enfants nés de ces unions faisaient le chemin inverse.

Mon voyage ne peut être plus différent. En 2025, prendre le train est généralement un choix. On opte pour ce moyen de transport en raison de son charme suranné, pour éviter de prendre l’avion ou pour prendre la mesure du territoire. Opter pour le train, c’est s’offrir une délicieuse parenthèse hors du temps entre les points A et B, mais aussi l’occasion de voir le paysage se transformer.

C’est ma deuxième expérience à bord de l’Océan. La première fois, c’était avec ma fille, alors âgée de cinq ans. Pas une seconde elle ne s’était ennuyée. En plus de découvrir les paysages, elle en avait profité pour convaincre sa mère de jouer à tous les jeux auxquels je refusais habituellement de jouer à la maison. Combien de parties de UNO avons-nous enchaînées pendant ces 22 heures de trajet?

Maya et MJ

Des inconnus qui ne le restent pas

Au-delà des images de cartes postales, ce que je préfère des longs voyages sur rails est le moment des repas, où les passagers des voitures-lits sont placés de manière aléatoire au restaurant. À bord du Canadien comme de l’Océan, le hasard facilite les rencontres. On se trouve à partager des petits bouts de voyage avec des gens d’un peu partout.

Le serveur m’indique une table pour quatre, où trois personnes sont déjà installées. Les autres convives : un couple de Campbellton et une dame d’Edmonton. Les Néo-Brunswickois viennent de passer une dizaine de jours à Montréal pour une opération qui les empêchent de prendre l’avion. L’Albertaine a effectué une partie du voyage à bord du Canadien et exploré Montréal avant de mettre le cap sur Halifax. Elle réalise ainsi son vieux rêve de traverser le pays – du moins, en grande partie! – par les rails.

Voiture-restaurant
Repas
Repas
À table

Au menu, en plus des entrées et desserts : bœuf braisé glacé aux champignons, saumon au beurre de dukka avec riz, raviolis à la courge musquée ou panir tikka masala (fromage à pâte molle non salé servi avec sauce et riz)… Les discussions vont bon train (sans jeu de mots!). La convivialité est aussi du voyage.

Ma cabine est toute petite, mais parfaite pour me permettre de me réfugier dans ma bulle entre deux moments de socialisation. Le préposé vient transformer mon fauteuil en lit. Je lui demande de ne pas reconvertir au petit matin, histoire de profiter pleinement de mon cocon pour faire la sieste et lire à l’horizontale.

Couloir qui mène aux cabines individuelles
Wagon lit
L’arrière-scène de Moncton

Les Maritimes, autrement

Selon la direction dans laquelle on voyage, le moment de l’année et l’heure à laquelle le jour fait place à la nuit, le décor n’est jamais tout à fait le même. Cette fois-ci, les décors du Bas-Saint-Laurent et de la vallée de la Matapédia tapisseront seulement mes rêves. Certains ont du mal à dormir à bord : moi, malgré les couinements de la bête de métal, le mouvement m’apaise.

Les signaux de cellulaire se font rares pendant l’essentiel du trajet, me forçant à contempler autre chose que mon ordinateur et mon cellulaire. La workaolique que je suis a toujours un peu de mal à décrocher, mais une fois déconnectée, je me surprends à ressentir une grande (la sainte?) paix. Le temps suspend sa course folle. Je me coule dans l’indolence du présent. C’est peut-être le temps de la sieste?

Quand je ne dors pas, je scrute les cours arrière des villes et villages traversés. Je lis. Je grignote (un peu trop). À Campbellton, je sors prendre un bain de soleil pendant une courte pause.

Arrêt à Campbellton
Lecture
Petit-Rocher

Près de Restigouche, au Nouveau-Brunswick, j’écarquille les yeux. La brochure distribuée aux passagers m’indique que nous en sommes au 19e arrêt du voyage. « Petit-Rocher, c’est la mer à votre portée. Ce sont des gens chaleureux qui aiment la vie et les visiteurs. Agréable en été et regorgeant d’activités en hiver, le village est un plaisir à visiter toute l’année grâce à l’accueil chaleureux de ses habitants et à ses multiples attractions touristiques. Chaque année, le 15 août, la fête nationale des Acadiens se célèbre ici en grande pompe. » Viennent ensuite Bathurst, Miramichi, Rogersville, Moncton…

Rails
Voiture de service
Fenêtre

Je suis presque déçue à l’annonce de notre destination finale. Je salue les passagers avec lesquels j’ai fraternisé. Halifax m’attend, avec toute son histoire (et ses histoires). Le début d’un autre voyage!

Gare d’Halifax
Quai de gare d’Halifax
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